Un chemin de la Retirada

Cinémathèque

Il y a dans la production audiovisuelle largement de quoi alimenter nos réflexions, approfondir nos connaissances et parfois même porter un regard neuf sur des sujets que l'on pensait très bien connaitre. La difficulté serait plutôt de dénicher le film qui répondra à nos attentes.

Mais comment en savoir assez pour faire son choix sans pour autant se faire divulgacher son plaisir ? Unchemindelaretirada vous aide à vous y retrouver en vous en disant juste assez sur les titres disponibles :

-> si vous cherchez un documentaire, rendez-vous sur notre page dédiée : les films documentaires

-> sinon, vous trouverez ci-dessous notre sélection de films, œuvres de fiction ou récits historiques, drames ou comédies, biopics, films d'animation, ... Il y en a pour tous les goûts, tous les âges et toutes les envies, et toutes ces œuvres sont disponibles en DVD.

Cinematheque

Notre sélection de films

 

Las 13 rosas

Drame, 2007 (2h12) de ‎ Emilio Martínez-Lázaro, Espagne.

Ce film est inspiré du livre "Treize Roses rouges" de Carlos Fonseca, qui retrace l'histoire vraie des 13 jeunes femmes arrêtées un mois après la fin de la guerre civile et fusillées à Madrid le 5 août 1939 par les nationalistes, après un sommaire procès à huit clos.

4 goyas en 2008.

Si l'athmosphère qui régnait à Madrid dans l'immédiat après-guerre parait plutôt bien reconstituée, le réalisateur semble avoir un peu enjolivé les conditions de vie des femmes détenues. Quoi qu'il en soit, c'est un témoignage poignant à voir "para que no se borre".

Attention : A ma connaissance, ce film n'existe qu'en version originale (espagnol) sans sous-titres.

Ay carmela

Comédie dramatique, 1990 (1h42) de Carlos Saura, Espagne.

Pendant la guerre civile, Carmela et Paulino, deux comédiens ambulants qui chantent pour les combattants républicains, sont arrêtés par les troupes franquistes. Pour sauver leur peau, ils vont accepter de monter un spectacle ridiculisant les brigadistes.

13 goyas en 1991, dont celui du meilleur film et de la meilleure actrice.

J'ai vu ce film sans trop savoir à quoi m'attendre : ça a été une très belle surprise. A la fois drôle et émouvant, ¡ Ay, Carmela ! dénonce l'absurdité de la guerre. Carmen Maura y est magnifique.

Belle epoque

Comédie dramatique, 1992 (1h50) de Fernando Trueba, Espagne-Portugal.

Le film s'ouvre sur une petite route de Galice au beau milieu de laquelle une valise semble avoir été oubliée. Le travelling-avant est accompagné d'une musique légère dont les notes rappellent le "Boléro" de Maurice Ravel. Fernando, un jeune déserteur républicain qui erre dans la campagne depuis des jours, est en train de pisser dans le bas-côté quand il est surpris par deux gardes civils. Fernando est arrêté mais, par un surprenant concours de circonstance, recouvre la liberté presque aussitôt. Voilà, le ton est donné ! C'est parti pour plus d'une heure et demi d'une comédie drôle et décalée.

L'intrigue repose avant tout sur l'éducation sentimentale de Fernando qui tombe successivement amoureux des 4 superbes filles de Manolo, un vieux peintre désabusé et anticonformiste qui l'a recueilli chez lui. C'est lumineux, sensuel, gourmand, léger et enjoué. Un régal !

Mais parce que le récit se situe au début de l'année 1931, Trueba en profite pour croquer une société qui, entre modernité et tradition, ne sait pas encore dans quel sens elle veut aller. La dictature du Primo de Rivera vient de s'achever, l'Espagne vit les derniers instants d'une monarchie qui va bientôt céder la place à la IIème République. Au travers des personnages, il est question de religion, de mariage, d'homosexualité, de démocratie,... des sujets sur lesquels les Espagnols s'apprêtent à s’entre-tuer. Dans cette Belle époque de confusion mais aussi d'espoirs, Trueba vient délayer un peu d'humour noir dans son humour potache, ce qui donne à cette comédie une profondeur peu commune. Et ça aussi, on s'en régale !

Cria cuervos

Drame, 1976 (1h44) de Carlos Saura, Espagne.

Orpheline de 8-10 ans, Ana vit à Madrid chez sa tante, une femme très à cheval sur les conventions. Dans cette grande maison qu'elle partage avec ses deux soeurs, sa grand-mère infirme et une domestique, Ana s'échappe de la réalité et fait revivre sa mère. Entre rêve, souvenirs et réalité, la vie de la fillette semble emplie de magie. Mais, la magie n'opère pas toujours...

C'est difficile de parler de Cría cuervos. C'est un film minimaliste, un huis-clos qui surprend et déroute un peu. Par moment, j'étais un peu perdue tant la frontière entre réalité et imaginaire est tenue, pour ne pas dire absente.

Mais c'est aussi un film riche qui propose plusieurs lectures. On peut y voir une fable sur le monde de l'enfance, une réflexion sur la mort et la résilience. Pour moi, c'est la parabole de l'Espagne franquiste qui s'est imposée. Aussi, j'y ai reconnu l'ambiance mélancolique de "l'Esprit de la ruche", autre grand classique du cinéma espagnol.

 

L echappee sauvage

Thriller, 2019 (1h39) de Benito Zembrano, Espagne.

1946. Dans un grand domaine agricole du Sud de l'Espagne, profitant que le contremaitre surveille un groupe de paysans qui s'échine à la moisson, un jeune garçon prend la fuite au travers de la plaine hostile. Aussitôt, le contremaitre lance ses hommes de main à sa poursuite...

Ce qui frappe le spectateur dès la première minute, c'est le tableau que dresse Zembrano de l'immédiat après-guerre civile : l'extrême dénuement des ouvriers agricoles qui travaillent sur l'immense domaine d'un propriétaire que l'on ne voit jamais, le pouvoir sans limite du contremaitre qui a littéralement droit de vie et de mort sur tout ce qui se trouve sur ces terres, la soumission totale (et vitale !) de toute la population, hommes, femmes et enfants, à cet ordre des choses. Il semble n'y avoir aucune échappatoire.

Alors, comment un gamin de 11 ans peut-il espérer se sauver ?

L'échappée sauvage, dont le titre original est Intemperie est l'adaptation cinématographique du roman du même nom de Jesús Carrasco  publié en 2013 et traduit en plus de 20 langues. L'intrigue est simple : le gamin parviendra-t'il à échapper à ses poursuivants ? Dans une athmosphère très western, drame social et drame rural s'entremêlent.

Admirablement servi par des acteurs excellents, l'échappée sauvage est un film à la fois dur et magnifique.

L espagnol

Drame, en noir et blanc, 1967 (téléfilm en 2 épisodes : 1h27 et 1h47) de Jean Prat, France .

En octobre 1939, alors que la France vient de déclarer la guerre à l'Allemagne et que la mobilisation a vidé les campagnes, des réfugiés espagnols trouvent à être employés dans les exploitations agricoles. Lucien Bouchot, vigneron dans le Jura, en a engagé deux pour les vendanges permettant ainsi à Pablo (=l'Espagnol) et à Enrique de quitter le camp du sud de la France où ils étaient internés, pour le petit village de Château-Chalon. Pablo n'a plus rien en Espagne. Il y a tout perdu : sa femme, sa maison, sa carrière de dessinateur,... et tous ses projets d'avenir. L'Espagnol est un homme brisé, désenchanté, hanté par ses souvenirs, qui ne parvient à trouver l'oubli et la paix que dans le travail harassant de la terre. Enrique, lui, ne veut pas de ce quotidien de labeur et quitte rapidement la ferme pour continuer la lutte...

Se contenter de ne voir qu'une seule des deux parties du téléfilm n'aurait aucun sens. L'action de la première partie, intitulée "l'Étranger dans la vigne" se déroule sur un peu moins d'un an, depuis l'automne 1939 jusqu'à l'arrivée des soldats allemands dans le village en 1940. La seconde "les Dernières vendanges" nous amène jusqu'à la victoire de 1945.
Au cours de ces années, il est question de la vie ou plutôt du retour à la vie d'un homme que la guerre a brisé et qui se reconstruit par le travail de la terre.

Je n'ai pas lu le livre de Bernard Clavel mais je n'ai aucun doute sur le fait que le téléfilm lui soit tout à fait fidèle car l'auteur a lui-même participé à l'adaptation de son roman, notamment en en écrivant les dialogues. Quant à Jean Prat, le réalisateur signe-là l'une des œuvres emblématiques de la télévision française ; un chef d'œuvre disent les initiés.

Quoi dire si ce n'est que j'ai été très touchée, bien sûr, par le personnage de Pablo dont le parcours me rappelle celui de mon aïeule. Libérée d'un camp grâce à un exploitant agricole qui lui a signé un contrat d'embauche, c'est à partir de là qu'elle a pu, elle aussi, construire sa vie d'immigrée en France.

Mais, j'ai tout aussi apprécié de voir à l'écran la vie quotidienne des campagnes françaises telle qu'elle était avant 1950 et, franchement, c'est stupéfiant de se rappeler comment étaient les choses il y a si peu longtemps, quant tout n'était pas encore qu'une incessante et bruyante agitation.

Alors ça donne quelques longueurs, oui, mais c'était aussi ça le temps d'avant, quand on savait encore s'accorder des moments hors du temps faits de plaisirs à la fois simples et essentiels, comme pouvait l'être un instant de contemplation devant une nature que l'on peinait à apprivoiser. Si ce rythme lent m'a convenu, je crains toutefois que les longueurs ne déconcertent beaucoup un jeune public biberonné aux bandes-sons tonitruantes et aux images frénétiques des super-productions américaines !

 

L esprit de la ruche

Drame, 1973 (1h33) de Víctor Erice, Espagne.

Alors que la guerre civile est achevée depuis quelques mois, un cinéma itinérant s'arrête à Hoyuelos, un petit village de Castille, pour y projeter le Frankenstein de James Whale. La petite Ana, très impressionnée par le film et les mensonges de sa sœur ainée, se persuade que le monstre existe et se met en tête de le rencontrer...

Classique du cinéma espagnol, ce film -tourné dans les dernières années de la dictature- dénonce avec subtilité l'écrasante chape de plomb qui s'est abattue sur l'Espagne à la fin de la guerre civile.

L'Esprit de la ruche est un film court qui s'écoule lentement et qui, pour emprunter son expression à l'un des personnages, laisse le spectateur dans un état de "triste épouvante".

Et vint le jour de la vengeance

Drame, 1964 (1h56) de Fred Zinnemann, Etat-Unis.

A la fin de la guerre civile, Manuel Artíguez passe la frontière et se réfugie en France. Il vit à Pau depuis vingt ans lorsqu'il reçoit la visite de Paco, le fils d'un compagnon d'armes qui vient de mourir en Espagne sous les coups de Viñolas, le sergent de la Garde Civile. L'enfant demande au guérillero de retourner à Saint Martin pour le venger et tuer Viñolas. Manuel hésite. Il se doute bien que le sergent n'a pas renoncé à le traquer...

Et vint le jour de la vengeance est l'adaptation cinématographique du roman d'Emeric Pressburger "Killing a mouse on sunday", lui-même librement inspiré de la vie de l'anarchiste espagnol Francesc Sabaté. Je n'ai pas lu le livre. Aussi, il m'est impossible de vous dire si l'adaptation est fidèle ou non. Ce qui est sûr, c'est qu'il faut un peu chercher pour trouver quelques similitudes avec la vie de l'anarchiste.

J'ai apprécié le casting qui m'a rappelé les soirées télé de mon adolescence (Gregory Peck, Anthony Quinn, Omar Sharif), les séquences tournées en décors naturels (dans les Pyrénées, à Pau, à Lourdes...) et la savoureuse galerie de personnages secondaires. Mais pour le reste... On peut lire sur la jaquette " une fresque humaine et historique haletante" et "un très grand film d'aventures". C'est un peu sur-vendu car lorsque survient finalement le jour de la vengeance, on se surprend à se dire "Quoi ? Tout ça pour ça ! "

Fiesta

Drame, 1995 (1h48) de Pierre Boutron, France.

En septembre 1936, alors que Rafael de los Cobos, 16 ans, vient de faire une nouvelle rentrée dans le lycée catholique d'Arcachon où il est pensionnaire depuis 4 ans, il est rappelé en Espagne par son père, un militaire issu de la haute noblesse, pour y accomplir son devoir. Rafael est fier et enthousiaste à l'idée de servir son pays. Il est pressé de monter sur le front et se battre contre les "rouges". Mais avant cela, il est envoyé dans une garnison dirigée par un ami de son père, le Colonel Masagual, pour y apprendre ce qu'est la guerre. Quelques jours suffiront à l'aguerrir...

Tiré d'une histoire vraie, Fiesta est inspiré du roman éponyme écrit en 1971 par José-Luis de la Vilallonga, fils d'une famille proche de la cour d'Alphonse XIII, qui participa à l'âge de 16 ans à la guerre civile du côté des nationalistes.

J'ai eu du mal à entrer dans le film, tant les premières minutes (celles qui se passent en France) m'ont peu convaincue. Par contre, sitôt que Rafael a eu passé la frontière, l'atmosphère changeant, je me suis trouvée -comme le jeune homme- emportée dans cette plongée dans l'armée franquiste, une plongée d'un cynisme absolu.

Dans le rôle du Colonel Masagual, Jean-Louis Trintignant est époustouflant. A voir également, l'entretien avec le réalisateur qui est en bonus sur le DVD.

La fille de tes reves

Comédie, 1998 (1h56) de Fernando Trueba, Espagne.

1938. Une équipe de tournage espagnole est invitée en Allemagne nazie pour tourner une comédie musicale. Dès leur arrivée dans les studios de l'UFA, société de production cinématographique allemande, les artistes comprennent qu'ils devront composer avec les exigences de Goebbels, Ministre allemand de la Propagande...

Les films qui évoquent la collaboration entre l'Espagne nationaliste et l'Allemagne nazie sont trop rares. C'est pourquoi, bien que son scénario ne traite ni de la guerre d'Espagne ni de l'exil des républicains espagnols, j'ai tout de même pris le parti de faire figurer la Fille de tes rêves dans notre sélection.

Les rebondissements sont peu crédibles mais on passe un bon moment devant ce vaudeville sans prétention, notamment grâce aux excellents comédiens qui composent l'affiche de cette farce.

La guerre est finie

Drame, en noir et blanc, 1965 (2h02) de Alain Resnais, France-Suède.

1965. Franco est au pouvoir depuis presque 30 ans. Depuis tout autant, Diego, un communiste espagnol réfugié en France, poursuit le combat dans la clandestinité. Ses camarades et lui aspirent à renverser le régime à force de tracts, d'actions de terrain et d'appels à la grève générale. Mais à Madrid, l'étau se resserre autour du réseau de révolutionnaires...

Franchement, je ne m'attendais pas à ça. Mais La Guerre est finie n'est pas un film d'action. Et non ! C'est un film sur l'action clandestine des révolutionnaires espagnols exilés. C'est un film politique qui traite, notamment, de la crise qui a secoué le parti communiste dans les années 60.

Pour écrire le scénario, Jorge Semprún s'est très largement inspiré de la période de sa vie, où membre du parti communiste espagnol, il coordonnait depuis la France la résistance au régime franquiste. On reconnait son parcours clandestin dans celui du personnage principal : un parcours solitaire en dépit des nombreux contacts avec les camarades, fait de missions en Espagne réalisées sous des noms d'emprunt et dans la crainte permanente de l'arrestation.

Alain Resnais ne se contente pas de montrer le quotidien de Diego mais il fait entrer le spectateur dans la tête du révolutionnaire : la voix off est la voix intérieure qui le guide et l'encourage, les flash-back et flashforwards sont les scénarios que construit son esprit. Les images du présent et celles de la représentation imaginaire s'enchainent sans transition. Ce montage peut déconcerter mais il donne du rythme au récit et de l'intensité à l'intrigue. C'est plutôt réussi. Par contre je ne vois pas ce que viennent faire les deux scènes érotiques dans cette histoire, mais bon.

Ce film appartient à la mémoire historique des réfugiés espagnols en France. A voir donc.

Josep

Film d'animation, 2020 (1h12) de Aurel, France.

Au cours de l'hiver 39, les combattants républicains franchissent les Pyrénées enneigées et, dès leur arrivée en France, sont emprisonnés dans des camps de concentration. Josep raconte comment Josep Bartolí, un artiste barcelonnais, et Serge, son gardien, sympathisent en dépit des circonstances.

Sélection officielle à Cannes 2020.

Un film splendide, vraiment, mais qui peut être déroutant pour ceux qui ne savent rien du tout de ce chapitre de l'Histoire.

Le labyrinthe de pan

Film fantastique, 2006 (1h52) de Guillermo del Toro, Espagne.

Au printemps 1944, alors que la guerre civile est achevée depuis plus de 5 ans, Ofelie aménage dans la maison du nouveau mari de sa maman, un capitaine de l'armée franquiste, tyranique et brutal, qui traque et élimine les maquisards de la région. Le soir de son arrivée, la fillette découvre un vieux labyrinthe...

Le film a reçu de très nombreuses distinctions.

Les scènes du monde réel, très réalistes et d'une grande brutalité, alternent avec les scènes de la fable, fantastique et tout aussi dangereuse que la réalité. Pour les amateurs de contes noirs. En France, le film est interdit aux moins de 12 ans.

Land and freedom

Drame historique, 1995 (1h49) de Ken Loach, Royaune-Uni.

En faisant du tri dans les affaires de David, son grand-père décédé, une jeune femme découvre que celui-ci s'est rendu en Espagne en 1936 pour se battre dans les rangs d'une milice du P.O.U.M. (Parti Ouvrier d'Unification Marxiste). Pour David, tout a commencé à Liverpool, lors d'une réunion du Parti communiste de Grande-Bretagne...

Le film retrace le périple de David, alors jeune homme, en Aragon dans la milice du P.O.U.M. puis en Catalogne au sein des Brigades internationales, son idéalisme et son courage,  ses doutes et ses désillusions tandis que de graves querelles intestines sapent l'unité du camp antifranquiste. Ceux qui ont lu Hommage à la Catalogne de George Orwell retrouveront dans le film de Ken Loach le même traitement de cette tragédie politique.

Drôle de coïncidence ! En 1995, en Espagne, tandis que Ken Loach tournait Land and freedom, à quelques centaines de kilomètres de là Pierre Boutron tournait Fiesta. Sans le savoir, les réalisateurs mettaient en image le même thème dans les deux camps qui s'affrontaient : la désillusion.

La lengua de las mariposas

Drame, 1999 (1h35) de José Luis Cuerda, Espagne.

Hiver 1935-1936, dans un village de Galice. Un garçon de 8 ans, Moncho, retourne à l'école après une longue maladie. Là, il se lie d'amitié avec Roque, un camarade de classe, mais surtout il fait la connaissance de Don Gregorio, le maître qui va aiguiser et nourrir sa curiosité au cours de leçons très variées comme l'origine de la pomme de terre ou la forme de spirale que dessine la langue des papillons. Au fil des semaines, la relation entre le jeune Moncho et le maître d'école va se transformer en une grande amitié mais le 18 juillet viendra tout bouleverser.

Le scénario de la Lengua de las mariposas est librement inspiré de trois nouvelles issues du recueil de contes ¿Qué me quieres, amor ? de Manuel Rivas.

C'est un très beau film, vraiment, et très bien interprété. Les 70 premières minutes sont pleines de poésie et de tendresse. On y voit le jeune Moncho qui apprend la vie guidé par son maître d'école, son copain Roque ou encore son grand frère. C'est drôle. C'est touchant. De temps en temps, par petites touches, Cuerda rappelle au spectateur que son histoire se passe en 1936 et que toute cette poésie va bientôt prendre fin...

Les 15 dernières minutes sont éprouvantes... mais, elles aussi, apprennent la vie à Moncho. Et quelle leçon !

Lettre a franco

Fresque historique, 2019 (1h43) de Alejandro Amenábar, Espagne.

A l'été 1936, Miguel de Unamuno, célèbre écrivain et brillant philosophe, homme tolérant et humaniste, recteur de l'université de Salamanque, décide de soutenir publiquement les militaires rebelles car il a la conviction que c'est là le seul moyen de rétablir un ordre public que la IIème République a été incapable de maintenir. Mais, alors que les arrestations et les exécutions se multiplient, ses convictions vacillent.

Nommé 17 fois aux Goya, lauréat de 5 Goyas dont celui du Meilleur Second Rôle.

J'ai beau chercher, je ne trouve absolument rien à reprocher à ce film, que ce soit dans la forme ou sur le fond, excepté...  le titre de la version française ! Non mais, d'où sort ce Lettre à Franco ? Il est évident que le distributeur français n'a pas la moindre idée de la valeur historique de l'expression Mientras dure la guerra.

La lumiere de l espoir

Drame historique, 2016 (1h43) de Sílvia Quer, Espagne.

1942. Depuis 3 ans, des milliers de réfugiés espagnols sont internés dans les camps du sud de la France. Dans ces camps meurent 9 bébés sur 10. A quelques kilomètres de l'horreur existe un havre de paix où les mères espagnoles peuvent donner naissance à leur enfant dans des conditions dignes : la Maternité d'Elne.  Quand les autorités françaises décident de sa fermeture, sa directrice, l'infirmière suisse Elisabeth Eidenbenz, tente de l'empêcher...

Tiré de faits réels, ce téléfilm s'adresse à un large public (déconseillé aux moins de 7 ans). Aussi, s'il évoque avec une franche clarté les conditions inhumaines dans lesquelles les réfugiés sont maintenus captifs, il ne les montre pas. Il n'en est pas moins bouleversant.

Avec un sujet comme celui-ci, il aurait été facile de sombrer dans le pathos. Mais, Sílvia Quer évite l'écueil, plonge le spectateur -non sans poésie- dans le quotidien de la Maternité et rend un hommage mérité à sa fondatrice. Un film à voir absolument !

DVD en vente sur le site de la Maternité d'Elne (66).

Madres paralelas

Drame, 2021 (1h58) de Pedro Almodóvar, Espagne.

Janis, jeune quadra célibataire enceinte d'un homme marié, et Ana, adolescente réservée et visiblement terrifiée à l'idée de devenir mère, partagent une chambre dans la maternité où, dans quelques heures, elles vont accoucher. Cette rencontre fortuite va mêler leurs destins...

Comme à son habitude, Almodóvar explore la figure de la mère mais ce qui est très nouveau dans ce long métrage, c'est qu'il confronte pour la toute première fois de sa carrière ses personnages au passé franquiste de l'Espagne. Lorsqu'il fait dire à Janis "il est peut-être temps que tu saches dans quel pays tu vis ", il semble que le réalisateur s'adresse directement au spectateur !

Car Janis est bien décidée à faire ouvrir la fosse commune où, depuis l'été 1936, son arrière grand-père est enseveli, bien décidée à lui donner enfin une sépulture digne, à lui et à tous ceux qui sont enterrés avec lui, parce que "tant qu'on n'aura pas fait ça, on n'en aura pas terminé avec la guerre".

Comme toujours avec Almodóvar, il y en aura pour dire qu'il va trop loin. Je ne suis pas de ceux là. Je pense, au contraire, que c'est une très bonne chose que des réalisateurs de sa renommée portent la mémoire historique, unissent leurs voix à celles des victimes dans le but, non pas de rouvrir de vieilles blessures, mais bien de refermer des plaies qui demeurent ce jour encore ouvertes.

Les milles

Guerre, 1995 (1h43) de Sébastien Grall, France.

Au printemps 40, une briqueterie désaffectée, située sur le hameau des Milles (13), réquisitionnée et transformée à peu de frais en camp d'internement pour "indésirables", est surpeuplée. Étrangers des camps du Sud-Ouest, et en particulier des anciens brigadistes, y côtoient des juifs expulsés d'Allemagne. Le commandant sait qu'il devra livrer son camp aux Nazis lorsque ceux-ci arriveront, ce qui parait inéluctable. Il décide alors, dans le plus grand secret, d'affréter un train pour évacuer un maximum d'internés.

Le film Les Milles est inspiré de l'histoire vraie de la plus grande évasion organisée à partir d'un camp d'internement français. Les amateurs d'action trouveront sans doute que ce film manque de rythme mais je le recommande pour la reconstitution de la vie quotidienne dans le camp et les portraits de ces français qui, en pleine débâcle, ont pris le parti de protéger les indésirables.

El portero

Comédie, 2000 (1h30) de Gonzalo Suárez, Espagne.

Espagne 1948. Tandis que les maquis poursuivent la lutte contre Franco depuis les montagnes, une camionnette pénètre poussivement dans un petit village des Asturies. A son volant se trouve Ramiro Forteza, un célèbre gardien de football qui gagne sa vie en défiant les villageois des hameaux qu'il traverse. Mais à Río Luna, le champion doit revoir ses plans quand le Sergent Andrade de la Guardia Civil lui fait une proposition qu'il ne peut refuser...

A l'origine, El Portero est un conte de Manuel Hidalgo (écrivain, scénariste et journaliste espagnol) publié en 1998 et si le scénario du film éponyme (co-écrit par le même Manuel Hidalgo) s'éloigne du récit originel, il en a conservé tout l'esprit. El Portero est donc un film court, au ton léger et décomplexé.

Avec sa galerie de personnages savoureux (mon préféré, c'est le curé !), ses décors naturels (les magnifiques Asturies) et un scénario qui ne manque pas d'originalité (ni d'intrigues secondaires !), on passe un moment très distrayant dans cette après-guerre de fiction.

Attention : A ma connaissance, ce film n'existe qu'en version originale (castillan donc). Possibilité de sous-titres mais seulement en anglais.

Pour qui sonne le glas

Drame, 1943 (2h50) de Sam Wood, États-Unis.

En 1936, Ernest Hemingway s'est engagé comme correspondant de guerre auprès de l'armée républicaine et de cette expérience est né, en 1940, son roman le plus célèbre : Pour qui sonne le glas. Tourné en 1943 pour moitié dans les studios de Hollywood et pour moitié dans le massif de Sonora (Mexique), le film éponyme de Sam Wood en est l'adaptation cinématographique.

Le succès de ce grand classique du cinéma hollywoodien repose sur la présence du couple mythique Cooper/Bergman ; Gary Cooper dans le rôle de Robert Jordan, un volontaire américain engagé dans le camp républicain et envoyé près de Ségovie pour faire sauter un pont, et Ingrid Bergman dans celui de Maria, une jeune fille de 19 ans recueillie par un groupe de miliciens après avoir été brutalisée par les franquistes.

Soyons clairs. Ce n'est pas la guerre civile qui est portée à l'écran mais le jeu de l'amour et de la mort, du courage et de la lâcheté, de la trahison et du sacrifice ; un jeu sur lequel plane en permanence le pressentiment d'un désastre imminent.

A l'époque de sa sortie en salle (dès 1943 aux Etats-Unis, en 1947 en France), personne n'avait besoin d'une explication de texte pour savoir ce qui s'était joué quelques années plus tôt en Espagne.
Mais 75 ans plus tard, il en va bien autrement...

"Pour qui sonne le glas" est un film qui n'a pas résisté au passage du temps et sa restauration en 1970 ne change rien à l'affaire. Trop bavard, trop long, trop joué, il a mal vieilli. Alors, à tous ceux qui voudraient (re)découvrir ce classique, je recommande plutôt le livre qui, lui, n'a pas pris une ride !

Une vie secrete

Drame, 2019 (2h27) de Aitor Arregi, Jon Garaño et Jose Mari Goenaga, France/Espagne.

Andalousie, 1936. Higinio, conseiller municipal, voit sa vie menacée par les phalangistes qui raflent les sympathisants républicains. Pour demeurer auprès de sa femme Rosa, il décide de se cacher dans sa maison, le temps d'organiser un départ moins risqué. Mais, le temps passe et la crainte des représailles condamne le couple à l'enfermement...

Le scénario s'inspire de l'histoire vraie de los topos (= les taupes). En Espagne, on a donné ce nom aux personnes qui, après la publication du décret-loi de 1969, sont sorties de cachettes aménagées dans leurs propres maisons. Dans certains cas, la réclusion avait duré plus de 30 ans.

Le film est long, oui, mais ne vous laissez pas rebuter par cette longueur. Il n'en fallait pas moins pour que nous autres, qui nous sommes plaints d'être confinés quelques semaines pendant la pandémie, ressentions un tout petit peu l'épreuve de l'austérité et du temps !

Le film est excellent : la reconstitution est extrêmement soignée mais ce qui m'a touchée au plus haut point, c'est la performance des acteurs de ce huis-clos, Antonio de la Torre et Belen Cuesta. On ressent leurs tourments. On comprend la puissance de la peur, combien il est difficile de la surmonter lorsque celle-ci est devenue l'instrument de tout un régime.

Voz dormida

Drame, 2011 (1h58) de Benito Zambrano, Espagne.

Novembre 1940, an 2 de la Victoire. Incarcérée à la prison pour femme de Madrid, Hortensia attend d'être jugée pour "crime d'adhésion à la rébellion" par un tribunal militaire. Elle encourt la peine de mort et le fait qu'elle soit enceinte de son premier enfant n'a que peu de chance d'influer la sentence. Pour la soutenir dans l'épreuve, sa jeune sœur Pepita a quitté sa campagne andalouse natale pour s'installer à Madrid. Cette dernière va tout tenter pour qu'Hortensia échappe au peloton d'exécution...

Quand la Guerre civile prit fin le 1er avril 1939, après 3 longues années d'horreur, ne vint ni le temps de la paix, ni celui de la réconciliation mais s'ouvrit le temps des représailles. C'est ce que vient nous rappeler cette fiction historique.

Avant d'être un film, la Voz dormida est un livre de Dulce Chacón qui connu un immense succès en Espagne (Premio Libro del año 2002). Dans ce roman écrit à partir de témoignages authentiques, l'écrivaine, poète et dramaturge espagnole, redonne voix aux femmes que le régime de Franco a emprisonnées, torturées et condamnées au silence.

Le film La Voz dormida en est l'adaptation cinématographique et le moins que l'on puisse dire est que la reconstitution est vraiment très soignée. Les scènes tournées dans l'ancienne prison de Huelva sont saisissantes de réalisme. L'atmosphère de l'immédiat après-guerre est admirablement bien rendue. Les acteurs sont tous excellents. A tous points de vue, c'est un film réussi.

C'est aussi une œuvre de mémoire et un vibrant hommage à toutes les femmes qui n'ont que leur dignité et leur force morale à opposer à leurs tortionnaires.

A voir absolument !

Et vous ? Vous connaissez un film que vous aimeriez recommander ?

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